3 septembre 2015 (4)

Pour Odette
tant de messages, de poèmes, de musiques
ce jour de septembre, de toutes parts venus

ainsi tressons-nous à notre tour
comme une
bibliothèque dans les nuages

 (extraits des textes reçus)

Odette,
En face de moi, la mer
immense et paisible, qui se repose de l’été.
Le bleu est vert
l’eau est vert d’eau.
Je suis libre et sereine.
Tu le sais, tu fais partie des quelques personnes autour de moi ,qui m’ont amenée jusqu’ici.
Je suis libre et sereine.
Libre d’être là , maintenant, telle que je suis.
Là et maintenant.
La mer immense comme le monde.

Marianne

____

« Cara Odette, grazie per essere passata nella mia vita! Il tuo ricordo è sempre presente nei miei pensieri e cercherò di portare avanti un pezzetto delle tue idee e delle tue convinzioni sulla grande rivoluzione che può portare la diffusione dei valori dell’ E.N. So che sei vicino a tutti noi e spero che tu possa aiutaci nel nostro cammino!  Questa favola filosofica « Quel che c’è da capire » è per te.
Con infinito affetto. Cristina »

Alice capisce tutto quel che c’è da capire. Quel che c’è da capire, dicevano i grandi, è in una grossa pentola, di quelle in cui si scalda l’acqua  per  la pasta; solo che questa pentola non si può più usarla per scaldare l’acqua perché qualcuno ha avuto la bella idea di metterci dentro quel che c’è da capire. Così i grandi l’hanno nascosta in cantina, in mezzo a tane cianfrusaglie, e perché quel che c’è da capire non esca fuori e si disperda ai quattro venti l’hanno sigillata ermeticamente con del nastro adesivo e sopra ci hanno messo un ferro da stiro, una chiave inglese e un’incudine – oggetti pesanti, insomma, per tenere il contenuto al sicuro.

Alice, perciò, non si è fatta scoraggiare dalle loro precauzioni ed è andata a cercare la pentola. La cosa più difficile per lei è stata scendere in cantina: la scala è stretta e buia, e in fondo bisogna girare un angolo, e mentre si scende si ha l’impressione che dietro quell’angolo ci sia qualcosa di orribile, uno di quei mostri di cui parlano le favole – le  favole finte, voglio dire, quelle scritte per imbrogliarci e spaventarci. Prima o poi, stringendo forte i denti e chiudendo gli occhi, Alice è arrivata in fondo alla scala; e quando ci è riuscita ha subito voluto riprovarci, e ha riprovato e ancora e ancora, finché poteva farlo canticchiando e saltando i gradini a due a due. Superato l’ostacolo della scala, il resto è venuto liscio come l’olio: la porta della cantina non è chiusa a chiave, la pentola è lì in bella vista  gli oggetti pesanti che ci sono sopra non occorre sollevarli. Basta inclinare la pentola e cadono di lato; allora si tratta solo di togliere il nastro adesivo e alzare il coperchio.

Alice ha compiuto questa operazione più volte. La prima volta è rimasta sorpresa, perché nella pentola non ha trovato nulla. Ha pensato che fosse l’ora sbagliata: che forse le cose si capiscono di sera, o di notte, o la mattina molto presto quando è già chiaro ma non è comparso il sole. Così è tornata, di sera, di notte, di mattina molto presto, muovendosi circospetta con i suoi piedini leggeri per non svegliare nessuno;  ma la pentola era sempre vuota. Per un po’ Alice  rimasta delusa, e si è anche preoccupata. “Sta a vedere” pensava “che aprendo la pentola ho lasciato ve ir fuori tutto quel che c’è da capire, e ora si è disperso ai quattro venti e nessuno lo troverà più”. “Ma no” si rispondeva poi  “ci sono stata bene attenta. Non ho visto niente che usciva. E, se non ho visto niente, che cosa c’era da capire?”

Alla fine, Alice ha capito. Ha capito che i grandi avevano torto: quel che c’è da capire non si mette in una pentola, non si nasconde in cantina, perché non può venirci da fuori, non può esserci dato da un altro. Ha capito che  si capisce solo quel che abbiamo dentro, e se lo capiamo bene possiamo farlo venire fuori, e costruirci case e ponti e automobili e trattori; ma, se non capiamo quel che abbiamo dentro, fuori non c’è niente da capire.

Quando ha capito, Alice ha chiuso la pentola con il nastro adesivo e faticosamente ci ha rimesso sopra l ferro d stirare, la chiave inglese e l’incudine. Da allora passa molto tempo nella sua camera, a capire quel che ha dentro; poi esce e con quel che ha capito cambia il mondo.

Ermanno Bencivenga, La filosofia in sessantadue favole

Cristina

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Je suis entré dans votre famille en juillet 1980 et j’ai ressenti ton énergie et ta force immédiatement. Toute entière au service de l’amour du français, langue et écriture, bonheur de partager cette langue avec tous, de l’offrir comme une flamme à ceux qui en manquent le plus.
Tu es de la même trempe que mes premiers instituteurs et professeurs qui m’ont greffé et insufflé cet amour. Viatique formidable, vivant et sacré pour entrer de plein pied dans la citoyenneté française et communier aux valeurs de la liberté, égalité et fraternité.
La fusion de votre amour a irradié comme un soleil votre travail de grands serviteurs de l’école française dans ce qu’elle a de plus beau et légitime. Merci à vous qui avaient distribué ensemble cette manne du coeur et de la langue si généreusement. Odette tu nous manques ! Nous essayons de nous montrer digne de toi, citoyens du monde !

Athanas
devenu pleinement français grâce à vous

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Sous l’histoire, la mémoire et l’oubli
Sous la mémoire et l’oubli, la vie.
Mais écrire sa vie est une autre histoire.
Inachèvement.

Paul Ricœur,  La mémoire, l’histoire, l’oubli

j'écris dans l'air pour Odette_NEWFiligranes N°90
une page augmentée (Jean-Jacques Dorio)
juillet 2015

Jean-Jacques

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La soirée de décembre

Amis pleins de rumeurs où êtes-vous ce soir
Dans quel coin de ma vie longtemps désaffecté ?
Oh ! je voudrais pouvoir sans bruit vous faire entendre
Ce minutieux mouvement d’herbe de mes mains
Cherchant vos mains parmi l’opaque sous l’eau plate
D’une journée, le long des rives du destin ! (…)

René-Guy Cadou, In Œuvres poétiques complètes, © éd. Seghers

 

Vous aviez tendu à notre solitude de vos mains bienveillantes
Quand nous marchions dans le brouillard des jours.
Nous cherchons vos visages dans la nasse des nuages,
Votre ferveur à être au monde dans les raies du soleil
Au-dessus des cimes. Vous vaquerez, souvenirs, dans la luminescence
Comme des voiliers sur la mer océane.
La main que vous avez tendue vers nous, ces jours passés,
Est l’aiguille de notre boussole.
Elle donne pour ici et ailleurs
le cap de la Bonne-Espérance…

Anne-Marie

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Merci à vous, parents, enfants et petits-enfants,
ami(e)s d’Odette

Hommage à toutes les langues du monde qui,
se souvenant de celles et ceux qui nous ont quittés
donnent forme à notre commune humanité

Merci, شكرا, Danke, Grazie, благодарю, Gracias, תודה

M.

3 septembre 2015 (3)

Pour Odette
tant de messages, de poèmes, de musiques
ce jour de septembre, de toutes parts venus

ainsi tressons-nous à notre tour
comme une
bibliothèque dans les nuages

 (extraits des textes reçus)

Les rêves dont devenus des visages habités par le temps
L’amour a jeté l’ancre
C’est sur son épaule que tu t’appuies
C’est son regard qui te porte au-delà des murs
Il t’arrache aux trous noirs
Où l’utopie s’éteint
Il file les couleurs en écheveaux serrés
Dans le noir brillant de l’encre
Il piège la lumière
Dans le temps qui infuse à travers  nos mémoires
Les mots qu’il a offerts sont terre hospitalière.

Michèle

 

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P1100875

Quand le bruit des bois tarit dans nos corps
Étonnés nous lisons cette aile de terre
Rouge, à l’ancrée de l’ombre et du silence
Nous veillons à cueillir en la fleur d’agave
La brûlure d’eau où nous posons les mains
Toi plus lointaine que l’acoma fou de lumière
Dans les bois où il acclame tout soleil et moi
Qui sans répit m’acharne de ce vent
Où j’ai conduit le passé farouche.

Edouard Glissant, Pays révé, pays réel

Christian et Marie-Claude

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Capture d’écran 2015-09-06 à 10.07.50

Chut, plus de bruit…

Cette comptine que tu m’as apprise,
Odette ma sœurette,
À Naama, sera transmise,
Grâce à toi, le temps n’a pas de prise
Et ce n’est que partie remise…

Cathy

 

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Écume de la terre dans son effort constant
De dire sa vie muette
Des reliefs ressortent chaque matin
Chaque soir des nouveaux paysages
Terre illuminée, repeinte

Teresa

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Capture d’écran 2015-09-06 à 10.11.10

Osfour, chanson de Marcel Khalifè

et sa traduction :
Un oiseau

Un oiseau se tint à la fenêtre et me dit ‘Ô petit(e)’
Cache-moi avec toi, cache-moi je vous en prie Ô petit(e)’
Je lui ai dit ‘d’où es-tu ?’. Il me dit ‘des limites du ciel’
Je lui ai dit ‘d’où viens-tu ?’. Il me dit ‘de la maison du voisin’
Je lui ai dit ‘de qui as-tu peur?’. Il me dit ‘de la cage à corbeau’
Je lui ai dit ‘où sont tes plumes?’. Il me dit ‘le temps les a emportés’
Un oiseau se tint à la fenêtre et me dit ‘Ô petit(e)’
Cache-moi avec toi, cache-moi je vous en prie Ô petit(e)’

Une larme coula sur sa joue et ses ailes se replièrent sur elles-mêmes
Il atterrit sur le sol et dit : ‘je veux marcher mais je ne peux pas
Je l’ai pris sur mon cœur, ses blessures me faisaient mal
Avant d’avoir éclaté sa prison, sa voix et ses ailes se brisèrent
Je lui ai dit ‘d’où es-tu ?’. Il me dit ‘des limites du ciel’
Je lui ai dit ‘d’où viens-tu ?’. Il me dit ‘de la maison du voisin’
Je lui ai dit ‘de qui as-tu peur?’. Il me dit ‘de la cage à corbeau’
Je lui ai dit ‘où sont tes plumes?’. Il me dit ‘le temps les a emporté’

Je lui dis, n’ais pas peur, regarde, le soleil se lève
Il regardât vers la forêt et vu une marrée de paillettes de liberté
Il vit flotter les ailes des oiseaux au-delà des hautes portes
Il a vu la forêt de vol. Sur les ailes de la liberté.
Je lui ai dit ‘d’où es-tu ?’. Il me dit ‘des limites du ciel’
Je lui ai dit ‘d’où viens-tu ?’. Il me dit ‘de la maison du voisin’
Je lui ai dit ‘de qui as-tu peur?’. Il me dit ‘de la cage à corbeau’
Je lui ai dit ‘où sont tes plumes?’. Il me dit ‘le temps les a emportés’
Un oiseau se tint à la fenêtre et me dit ‘Ô petit(e)’
Cache-moi avec toi, cache-moi je vous en prie Ô petit(e)’

Mahmoud Darwich se demande s’il est un ciel derrière le ciel, où partent les oiseaux après le dernier ciel et comment écrire au-dessus des nuages le legs des siens. Il sait que d’un ciel à l’autre, passent les rêveurs. Il aime les nuages qui imitent une volée de créatures et cherche parfois un ciel moins élevé. Un nuage dans sa main l’a blessé mais il n’oublie pas de nous engager à danser au firmament des mots.

Natalie

 

 

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Cheminer

Dans la forêt des mots
Il sculpta son langage
Sa mémoire s’allongea
Au-delà du passé

Dans l’océan des signes
Il puisa ses images
Sa vision s’ajusta
Au rythme des cités

Dans le spectacle des choses
Il creusa son sillage
L’instant ensemença
Les dunes d’éternité.

Andrée Chedid, Rythmes

album[1]

Jeannine

 

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Pas de mode d’emploi ni de consignes.
Juste quelques propositions :

Cliquer sur ce lien, fermer les yeux, monter un peu le son (… mais pas trop), incliner la tête en direction du Sud, imaginer que l’on est par exemple sur cette terrasse de Carnoux que nous connaissons tous…, respirer l’odeur des pins…, écouter…

… et revoir ce sourire malicieux sur les lèvres d’Odette qui se rappelle de ce pays qu’elle affectionnait tant.

Capture d’écran 2015-09-06 à 10.40.38Souad Massi – Raoui (vost)

Sylvain

_______

« LIBER » : partie vive de l’écorce où circule la sève qui nourrit – durablement – l’arbre FILIGRANES.

Par delà l’absence qui m’est douleur, et bien davantage loin de vous tous, je te dédie, Odette, ce mot majuscule, toi qui m’as accueilli d’un franc sourire à rejoindre votre précieuse Revue d’écriture(s).

« LIBER », LIBRE et LIVRE. Tout toi, chère Odette ! dans la joie comme l’adversité.
A m’unir, dans l’émotion de ce rassemblement d’amitié (où les mots d’eux mêmes finissent par se taire).

Claude

_____

Aux limites de l’invisible
Et de l’impalpable,
Mon cœur, dans sa double cécité,
Entend comme un écho lumineux
A ses propres battements :
Une présence qui te ressemble,
Qui, de ses milliers d’yeux solaires
Et de ses multiples mains azurées,
Participe à la magie de mon histoire ;
car, à ta façon, tu es là
Et, n’en finissant pas d’exister,
Tu résistes au néant des ténèbres sans fond
Par cette place que je te garde
Au creux de ma tendresse sereine
Qui sait qu’elle a besoin de toi
Et se nourrit du souvenir éblouissant de tes sourires
Et se repaît de cet élan émerveillé
Qui te poussait toujours vers le simple et le pur
Dans la beauté sauvage ou puérile
Que la faune et la flore semaient sur ton chemin.

Jean-Jacques M.

 

______

Poème semé

Dans ta verticalité , ton regard bousculant les paraîtres,
Une invitation naissait          simple
Oser ce pas vers notre harmonie intime
Réveiller la vie
Franchir par des ponts de mots les vides
Construire  une arche
Un chemin secret…            sacré
Où quelque fois ensemble nous nous sommes égarés
Rêveurs, un instant             songeurs à tout bout de champ
Hors du temps reliant les quatre horizons
Un phare guide nos pas
Gardiens de la flamme
Nous avançons encore
Réunis par cet élan semé

Pour toi, pour nous
Olivier et Yvette

_____

Odette,

Comme
Une
Libératrice
Tentaculaire
Une
Rayonnante
Educatrice

Délicieusement
Exigeante

Puissante
Animatrice
Inspiratrice
Xénophile

Ô, CULTURE DE PAIX

Denis

 

________

Ma chère Tatie, à 14 ans j’ai appris “Roman” sur tes conseils (…)
c’est avec toujours le cœur en joie et émue
que je me récite “Roman” et les autres…

Roman

I

On n’est pas sérieux, quand on a dix-sept ans.
– Un beau soir, foin des bocks et de la limonade,
Des cafés tapageurs aux lustres éclatants !
– On va sous les tilleuls verts de la promenade.

Les tilleuls sentent bon dans les bons soirs de juin !
L’air est parfois si doux, qu’on ferme la paupière ;
Le vent chargé de bruits – la ville n’est pas loin –
A des parfums de vigne et des parfums de bière…

II

– Voilà qu’on aperçoit un tout petit chiffon
D’azur sombre, encadré d’une petite branche,
Piqué d’une mauvaise étoile, qui se fond
Avec de doux frissons, petite et toute blanche…

Nuit de juin ! Dix-sept ans ! – On se laisse griser.
La sève est du champagne et vous monte à la tête…
On divague ; on se sent aux lèvres un baiser
Qui palpite là, comme une petite bête…

III

Le cœur fou robinsonne à travers les romans,
– Lorsque, dans la clarté d’un pâle réverbère,
Passe une demoiselle aux petits airs charmants,
Sous l’ombre du faux col effrayant de son père…

Et, comme elle vous trouve immensément naïf,
Tout en faisant trotter ses petites bottines,
Elle se tourne, alerte et d’un mouvement vif…
– Sur vos lèvres alors meurent les cavatines…

IV

Vous êtes amoureux. Loué jusqu’au mois d’août.
Vous êtes amoureux. – Vos sonnets La font rire.
Tous vos amis s’en vont, vous êtes mauvais goût.
– Puis l’adorée, un soir, a daigné vous écrire !…

– Ce soir-là…, – vous rentrez aux cafés éclatants,
Vous demandez des bocks ou de la limonade…
– On n’est pas sérieux, quand on a dix-sept ans
Et qu’on a des tilleuls verts sur la promenade.

Arthur Rimbaud, Poésie

Mathilde

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ferme la porte de la classe
doucement sans faire de bruit
et pars dans le grand espace de la vie.

emporte dans tes bagages
les jolis moments de la classe des grands
et tout au long de ton voyage
n oublie jamais d être un enfant

Marie
(Un poème que j’offre à mes élèves, ton sourire entre les mots)

 

________

Hier à l’Aube

Hier, à l’aube, à l’heure où ronronnait Aubagne,
Tu es partie. Vois nous, qui sommes tes enfants,
Nous allons sur les textes, les dessins, les chansons.
Jamais loin de l’école, au pied du Garlaban.

Nous marcherons ensemble guidés par nos idées,
Nous avancerons toujours, nous aidant dans la nuit.
Ensembles, fiers et droits, et nos mains pour créer,
Forts, imaginons demain, nous ne sommes qu’écrit.

Nous laisserons sur ta tombe, des bouquets de cailloux,
Nous y mettrons des voiles pour traverser nos peurs.
Quand viendra Le Grand soir, nous mettrons à nos cous
ton foulard de soie rouge, ce sera le bonheur.

Ni&Jo (&VH)

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Lettre matinale à Odette

Plus d’ordinateur, me voilà réduite, pauvre glaneuse appliquée, à écrire d’une main devenue maladroite, les mots d’esprit, les trouvailles de lecture, ces petites étoiles de la pensée qui me donnent faim de vivre.  Cela m’enrage mais je continue à lire Frédéric Blanc comme on se baigne à la rivière. Alors je te le confie : « mais à quoi ça sert d’écrire ? »

Écrire ne sert à rien mais se taire est encore pire.
Pourquoi as-tu choisi de te taire, Odette ?

C’est une question que je me pose parce que M. nous a demandé de nous souvenir de toi, ce 3 septembre. Donne-moi un peu d’imagination, j’en manque. Je la cherche ailleurs dans ces petites phrases d’Henri Frédéric Blanc par exemple quand il égratigne l’utopie, cette étoile plus grosse que les autres que tu partageais avec nous, ce futur qui nous questionne où tu es peut-être.

Il dit une chose qui fait trembler la vérité : « Le futur, il sent un peu la friture, le futur. Il faudrait l’enjamber sans se brûler les fesses. Y revenir après l’avenir, histoire de ne pas arriver trop tard ».

Même si, en bonne humaine qu’il te fallait être, ton passé « te conduisait à la crèche » – c’est aussi une belle formule de cet auteur – tu l’auras tenté l’avenir et tu m’auras permis d’être vivante quelques temps dans le sourire de Filigranes, pour conjurer notre histoire comme des humains sans rien savoir. Ce matin, tu me reviens comme ça, après l’avenir, et mon café a plus de goût.

Arlette

 

Lire la suite…

3 septembre 2015 (1)

« Nous creusons une tombe dans les airs
Wir schauffeln ein Grab in den Lüften
on n’y est pas couché à l’étroit
da liegt man nicht eng »
Paul Celan « Todesfuge »

Pour Odette
tant de messages, de poèmes, de musiques
ce jour de septembre, de toutes parts venus

ainsi tressons-nous à notre tour
comme une
bibliothèque dans les nuages

 (extraits des textes reçus)

XXXVII

¿Dices que nada se crea?      Tu dis que rien ne se crée ?
No te importe, con el barro     Ne t’en soucie pas, de l’argile
de la tierra, haz una copa       de la terre fais un bol
para que beba tu hermano.    pour faire boire ton frère.

XXXVIII
¿Dices que nada se crea?      Tu dis que rien ne se crée ?
Alfarero, a tus cacharros.        Potier, retourne à tes pots.
Haz tu copa y no te importe    Fais ton bol et ne te mets pas en souci
si no puedes hacer barro.        si tu ne peux faire de l’argile.

Antonio Machado. Proverbios y Cantares Campos de Castilla (1907-1917)

Maria-Alice

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Capture d’écran 2015-09-05 à 23.40.05La mauvaise réputation (Georges Brassens)

Gérard

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Je continuerai de chanter !
Les Oiseaux me dépasseront
Allant vers des Climats plus lumineusement Jaunes –
Chacun – avec une attente de Grive –
Moi – avec mon Rouge-gorge –
Et mes Poèmes –
[…]
Emily Dickinson, Poésies complètes
(1861), traduction Françoise Delphy, édition bilingue, Flammarion, 2009.

 Gislaine

 

____

Capture d’écran 2015-09-05 à 23.31.49Los libertadores (Canto general, Mikis Theodorakis & Pablo Neruda)

Les libérateurs

Voici l’arbre,
l’arbre de la tempête,
l’arbre du peuple.
Ses héros montent de la terre
comme les feuilles sortent de la sève,
et le vent étoile les feuillages,
foule bruyante,
jusqu’à ce que retombe en terre
la semence du pain.

Voici l’arbre,
l’arbre nourri de morts nus,
de morts flagellés, de morts déchirés,
de morts aux visages insupportables
empalés sur une lance,
pulvérisés par le bûcher,
décapités par la hache,
écartelés par le cheval,
crucifiés dans l’église.

Voici l’arbre,
l’arbre dont les racines sont vivantes,
il changea en salpêtre le sang des martyrs,
ses racines mangèrent du sang,
il fit sortir des larmes du sol :
il les fit monter par ses ramures,
il les répandit dans son architecture.
Elles furent des fleurs invisibles,
parfois des fleurs enterrées,
d’autrefois des fleurs qui firent briller leurs pétales
comme des planètes.

Et l’homme cueillit sur les branches
les corolles durcies,
il les donna, de main en main,
comme s’il s’agissait de magnolias ou de grenades
et aussitôt, elles ouvrirent la terre
et grandirent jusqu’aux étoiles.

Pablo Neruda, Chant général (extraits)

Capture d’écran 2015-09-05 à 23.29.42Voy vivir (Canto general, Mikis Theodorakis & Pablo Neruda)

Je veux vivre
Je ne vais pas mourir. 
Je pars en ce jour rempli de volcans 
vers l’homme en foule, vers la vie.

 J’ai tout réglé. Je laisse tout en ordre.

 Maintenant que se pavanent les bandits 
avec la « culture occidentale » à pleins bras, 
avec des mains qui tuent en Espagne
 et des gibets qui se balancent sur Athènes 
et la honte qui gouverne le Chili. 
Mais je cesse de conter.
Me voici, 
avec des mots, des peuples, des chemins 
qui à nouveau m’attendent, des constellations de mains qui frappent à ma porte.

Pablo Neruda, Chant général

Noëlle

______

Suspendue dans le firmament,
La belle lune ensoleillée,
Dans une lueur argentée,
Me montra tous ses continents
Immenses, sombres et mystérieux,
Au-dessus des nuages bleus.
Les vois-tu, toi aussi ?
Et notre mer, en sursis,
Et nos forêts, sous les pluies
Grises, acides et amères,
Et tous les enfants de la Terre…
Entends-tu, ma très chère Amie,
Tous nos chants qui toujours espèrent?

Valérie

_____

« PARLEZ NOUS DE LA MORT… »
Alors Almira parla, disant : nous voudrions maintenant vous questionner sur la mort. Et il dit : Vous voudriez connaître le secret de la mort. Mais comment le trouverez-vous sinon en le cherchant dans le cœur de la vie ? La chouette dont les yeux faits pour la nuit sont aveugles au jour ne peut dévoiler le mystère de la lumière.
Si vous voulez vraiment contempler l’esprit de la mort, ouvrez amplement votre cœur au corps de la vie. Car la vie et la mort sont un, de même que le fleuve et l’océan sont un.
Dans la profondeur de vos espoirs et de vos désirs repose votre silencieuse connaissance de l’au-delà. Et tels des grains rêvant sous la neige, votre cœur rêve au printemps.
Fiez-vous aux rêves, car en eux est cachée la porte de l’éternité. Votre peur de la mort n’est que le frisson du berger lorsqu’il se tient devant le roi dont la main va se poser sur lui pour l’honorer. Le berger ne se réjouit-il pas sous son tremblement, de ce qu’il portera l’insigne du roi ? Pourtant n’est-il pas plus conscient de son tremblement ? Car qu’est-ce que mourir sinon se tenir nu dans le vent et se fondre au soleil. Et qu’est-ce que cesser de respirer, sinon libérer le souffle de ses marées inquiètes, pour qu’il puisse s’élever et se dilater et rechercher Dieu sans entraves ?
C’est seulement lorsque vous boirez à la rivière du silence que vous chanterez vraiment. Et quand vous aurez atteint le sommet de la montagne, vous commencerez enfin à monter. Et lorsque la terre réclamera vos membres, alors vous danserez vraiment.

Le prophète – Khalil Gibran

Françoise

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Capture d’écran 2015-09-05 à 23.44.19

Philippe Jaroussky (countertenor), Händel – Lascia ch’io pianga

 

L’espace de notre vie n’est ni continu, ni infini, ni homogène, ni isotrope. Mais sait-on précisément où il se brise, où il se déconnecte et où il se rassemble ? On sent confusément des fissures, des hiatus, des points de friction, on a parfois la vague impression que ça coince quelque part, ou que ça éclate, ou que ça se cogne. Nous cherchons rarement à en savoir davantage et le plus souvent nous passons d’un endroit à l’autre, d’un espace à l’autre sans songer à mesurer, à prendre en charge, à prendre en compte ces laps d’espace. Le problème n’est pas d’inventer l’espace, encore moins de le ré-inventer, […] mais de l’interroger, ou, plus simplement encore, de le lire […]
Georges Perec, Espèce d’espace

Dans les nuages boules
Un’ petite bibliothèque
Un’ source généreuse
[…] « Source-nuage »

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Traditionnellement, on utilise l’image d’un fleuve pour représenter le temps qui passe. Les Chinois ont remarqué cet écoulement de l’eau dans un fleuve qui ne revient pas, mais ils ont aussi constaté aussi que, au cours de son écoulement une quantité d’eau s’évapore pour monter dans le ciel et devenir nuages, lesquels retomberont en pluie pour alimenter à nouveau le fleuve à sa source. Donc l’expression « source-nuage » évoque cette grande loi du cosmos, de la vie à travers sa circulation inépuisable […]
François Cheng – Entretiens avec Françoise Siri

Pascale

 

______

le début d’un livre lu avec Odette, qui m’intriguait,
m’effrayait un peu, me faisait rêver…

« Par un épais, brouillard du mois de septembre deux enfants, deux frères, sortaient de la ville de Phalsbourg en Lorraine. Ils venaient de franchir la grande porte fortifiée qu’on appelle porte de France. Chacun d’eux était chargé d’un petit paquet de voyageur, soigneusement attaché et retenu sur l’épaule par un bâton. Tous les deux marchaient rapidement, sans bruit ; ils avaient l’air inquiet. Malgré l’obscurité déjà grande, ils cherchèrent plus d’obscurité encore et s’en allèrent cheminant à l’écart le long des fossés.
L’aîné des deux frères, André, âgé de quatorze ans, était un robuste garçon, si grand et si fort pour son âge qu’il paraissait avoir au moins deux années de plus. Il tenait par la main son frère Julien, un joli enfant de sept ans, frêle et délicat comme une fille, malgré cela courageux et intelligent plus que ne le sont d’ordinaire les jeunes garçons de cet âge. À leurs vêtements de deuil, à l’air de tristesse répandu sur leur visage, on aurait pu deviner qu’ils étaient orphelins. Lorsqu’ils se furent un peu éloignés de la ville, le grand frère s’adressa à l’enfant et, à voix très basse, comme s’il avait eu crainte que les arbres mêmes de la route ne l’entendissent :
— N’aie pas peur, mon petit Julien, dit-il ; personne ne nous a vus sortir.
— Oh ! je n’ai pas peur, André, dit Julien ; nous faisons notre devoir, Dieu nous aidera.
— Je sais que tu es courageux, mon Julien, mais, avant d’être arrivés, nous aurons à marcher pendant plusieurs nuits ; quand tu seras trop las, il faudra me le dire : je te porterai.
— Non, non, répliqua l’enfant ; j’ai de bonnes jambes et je suis trop grand pour qu’on me porte.
Tous les deux continuèrent à marcher résolument sous la pluie froide qui commençait à tomber. La nuit, qui était venue, se faisait de plus en plus noire. Pas une étoile au ciel ne se levait pour leur sourire ; le vent secouait les grands arbres en sifflant d’une voix lugubre et envoyait des rafales d’eau au visage des enfants. N’importe, ils allaient sans hésiter, la main dans la main ».
G. Bruno, Tour de la France par deux enfants, Paris, 1904

Laure

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Tu lances certainement des encouragements aux oiseaux fatigués
par le trop long voyage
À l’enfant dont le cartable est trop lourd
tu susurres une chanson qui s’imprime dans l’air
À l’arbre tu rappelles sa couleur pourpre prochaine
tu sais ces saisons-là et toutes les autres dans les langues que tu parles

Au livre que je relis tu as laissé ta voix

Des falaises anglaises j’ai rapporté une pierre,
toi qui voulais tant parler sa langue

Peut-être te racontera-t-elle tous les rires des enfants,
leurs périples sauvages, les côtes abordées ?

De sa craie j’en suis sûre tu tireras des histoires
et auras déposé sur les murs  des villes et campagnes une invite :
Revenir à la vague
Et voguer où l’espoir fait lueur

( ensuite attendre sa victoire?)
à bientôt Odette

Isabel

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Prière

Chère Odette, Où que nous soyons, nous y serons ce trois septembre. Tu sais, tous tes chantiers sont encore en chantier. Rien n’est solidement construit, sinon la détermination à construire. Tu peux toujours ajouter ta voix aux nôtres pour dire NON au chiffrage de l’humain, au triage, à l’étalonnage, au naufrage, au bourrage de crâne et et à tous les dommages qui sont de moins en moins collatéraux.
On ne va pas te leurrer, ça ne va pas fort, mais on continue à remonter nos rochers. Ils sont lourds, lourds…
Mais si ! Nous sommes heureux, heureux d’ouvrir encore des espaces de paroles libres, des petites cabanes de fraternité, des abris d’échange. Et nous sommes heureux parce que ta présence nous anime, quoique nous fassions, même si pour certains, comme moi, donnons l’impression d’être en retrait.
Oui, il y a “le Diable en France”,disait Lion Feuchtwanger, interné du camp des Milles, dans son livre autobiographique, pas qu’en France… et “Il n’y aura pas de paradis” pour Ryszard Kapuscinski. Au passage, je recommande ces deux livres pour la Bibliothèque des Nuages.
Si tu peux faire quelque chose, n’hésite pas, je sais bien que ce n’est pas dans ta nature. Il est évident que tu fais toujours quelque chose pour nous. On en voudrait pourtant un  peu plus, parce que ta présence terrestre nous manque. Quand tu nous” bottais les fesses”, ça nous poussait un peu plus loin. Ne nous oublie pas, pense bien fort à nous, s‘il te plait, encore et encore… Merci.

Nicole

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LIEBESLIED

Weiß sind die Tulpen; neige dich über mich.
Die Nacht tauscht Wind für fächelnde Hände ein.
Sag:es werden die Falter schwärmen?
Sag:mein Mund wird der einzige Kelch sein?
Und du schließt dein Aug vor dem rötlichen Schimmer –
sag?

Denn diesmal – fühlst du? – läßt dich mein Arm nicht mehr
in die Welt…
Weiß sind die Tulpen; neige dich über mich.

( Paul Celan, Todesfuge)

CHANSON D’AMOUR

Blanches, les tulipes ; penche toi sur moi
Du vent, la nuit fait le troc, mains qui tremblent.
Dis : les papillons seront-ils nuée ?
Dis : ma bouche, le seul calice ?
Et l’oeil, tu le fermes devant le rougeoyant scintillement  –
Dis ?

Car, cette fois-ci – le sens-tu ? mon bras ne te laisse plus
parcourir le monde
Blanches les tulipes ; penche toi sur moi

(d’après Paul Celan, Fugue de mort –  (trad. M.N.),
poète de langue allemande, d’origine roumaine,
dont les parents périrent dans les Camps de la mort.

Michel

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Traduction

Entrée dans l’absence du mot
Jouissance
On joue avec l’autre dit
Silence de la feuille écrite

On fait craquer la langue
À contre-sens
Les ponts sont passés
On trahit d’obscures frontières

Odette Neumayer
Paru dans Filigranes n°1, Fragments
22 juin 1984.

Consigne / Arbeits-Auftrag

Arbeits-Auftrag,
Hinzert, 13. September 2014
Jetzt nehme ich ihn an.
Hier lädst du mich fordernd ein.
Zum Ergründen.
Wer sammelt noch die vom Wind verschmähte Saat,
vergessen von den Vögeln?

Unbeirrt festen Trittes
betrete ich Sedimente des Wider-Wärtigen,
Ablagerungen des Unfassbaren,
Strohige Stoppeln, niedergetreten,
Verschleierte Unebenheiten des Bodens,
dunkle Inseln verdrängter Scham
Sandige Partikel deiner feurig-klugen Augen
Bohrende Erinnerung im diesig-kühlen Morgenbrummen.

Ich frage :
Warum darf ich das Gras nicht wachsen hören ?
Gelöchertes Gemäuer, weshalb kannst du dich deiner herzlichen Eingeweide nicht erwehren?

„Bitte Licht ausschalten“
Beißender Ruf in die Tabus der Gegenwart:
Verleidete Erkenntnis des verbotenen Landes
unantastbar, zwingend zum Weitblick.
Kennt der Feldhamster die Himmelsrichtung der rostbraunen Wolken?

Braun zu braun, gelb zu gelb, grau zu grau.
Traue nicht der grauen Trasse salbungsvoller Wörter.
verlasse die geebneten Wege.
Dann zwingst du mich innezuhalten.
Und ich weiß:
Et ass Hiescht wann dës Blumm an de Wise steet.
Und ich pflücke dich,
entreiße dich deiner Verortung Gleichgewichts.
Und ich frage:
Woher kommst du? Welches Wasser hast du geführt?
Und ich gehe weiter,
fragend zu den Freunden,
getragen von der Einladung deines liebenden Blickes.

Melanie Noesen, Pour Odette
(Gedenkstätte Hinzert, RFA)

 

hinzert

(Photo : M.Neumayer)

(Pour Odette)

C’est la consigne
Hinzert 13 septembre 2014
Voilà que je l’accepte
Avec fermeté, tu m’y invites.
Aller au fond des choses.
Que reste-t-il des semences que le vent a dispersées
Qui donc les rassemble encore ?
Oublieux les oiseaux

Imperturbable et de pieds ferme
Je pénètre les sédiments de l’im-monde
Dépôt de l’insondable
Chaume telle paille foulée au pied
Dissimulées les aspérités du sol
Sombre archipel de honte refoulée
Grains de sable de tes yeux d’intelligence brûlante
Obsédant souvenir dans le bourdon d’un matin de froid et de brume

Je pose la question :
Pourquoi ne serais-je pas autorisé à entendre l’herbe pousser
Mur ajouré, ne sais-tu donc retenir les entrailles du cœur ?

« Veuillez éteindre la lumière »
Cri mordant en plein tabous d’aujourd’hui
Détournée l’exploration du royaume interdit
Intouchable, obligeant à porter loin le regard
Que sait-il le hamster de la direction que prennent dans le ciel les bruns nuages de rouille ?

Brun sur brun, jaune sur jaune, gris sur gris.
N’aie aucune confiance dans la trace grise des mots qui apaisent.
Quitte les chemins aplanis.

Alors tu m’obliges à m’arrêter
Et je sais
Et ass Hiescht quand les fleurs poussent dans les champs
Et je te cueille
T’arrache de ton assignation à l’équilibre

Et je demande
D’où viens-tu ? Quelle eau portes-tu ?
Et je poursuis mon chemin
Posant la question aux amis
Soutenue par ton regard plein d’amour, il m’y invite.

Melanie Noesen

(traduction de Michel N.)

le 30 août

odette
La maison de Carnoux, sa terrasse, son jardin, ses arbres et ses fleurs lui donné rendez-vous ce 30 août pour un moment de souvenir, de parole, d’écriture.

° ° °

Combien de mots depuis qu’Elle est partie ?
Des mots pour donner un sens à l’absence
Des mots qui nomment le souvenir
Lui donne une continuité
Comme de nouveaux rhizomes
Une flore enracinée dans des dons passés
Quelque part autour de la table
Elle sera là demain
Dans les yeux
Dans les mains serrées et les bises appuyées
Si un passé ne reviendra plus jamais
C’est un futur avec une présence autre qu’il nous faut apprendre
Et c’est une chance énorme d’avoir chacun
Des traces
Des archives
Des millefeuilles de la mémoire
Des mots
Qu’Elle nous a dit
Qu’Elle nous a écrit
Qui font qu’on pousse sa vie
Dans des chemins pris seuls ou ensemble
Dans les plis d’une voile à 7 couleurs
Aux Cultures de la paix.

Pascale Lassablière

pascale - réduit

(Photo Pascale Lassablière)

 ° ° °

 

temps calme sous les eucalyptus
brise légère
les convives se sont échappés un instant vers le très bleu de la mer
dans la colline un chien a humé l’odeur de la viande et s’approche
les enfants repensent à jouer dans les arbres
pensées des amis qu se croisent et se répondent dans les filets dessinés par le vent
le ciel invente des danses silencieuses aux sources desquelles nos imaginations viennent boire

Isabel Ganga

° ° °

« C’était le sel dans la vasque du temps. Il n’en est resté que l’urne obscur des mots.
Est-il matin ? Certes l’obscurité est de bon augure, – quand les mots luisent au perron de la maison.
Dans ce royaume de nos mains. »

Edouard Glissant « Sel noir » (extrait choisi par Agnès Petit)

° ° °

À fleur d’éveil
En tout silence murmure d’une note
D’un souffle léger
Au profond de la nuit perle d’une lueur
D’un minuscule éclat

Rencontre là

Larme de mémoire dans la chair du monde

Alors

Germe une graine à fleur de terre
Perce un petit mot d’en vie d’amour
Tenace pensée sur le tapis du jardin

Vogue ton âme en présence invisible
À fleur de vie toujours à renaître

Une petite pensée.

Chantal Blanc.

° ° °

 

S’ouvre un ciel
S’ouvre un ciel bouloché d’azur
L’horizon s’élargit comme l’esprit des sages
Mais le temps que tu n’habites pas
Endolorit jusqu’à ma chair

Dans le dégoût des heures fades
Bercé de haut-le-cœur où palpite l’attente
Le mal preuve la plus indéniable
Est devenu un bien précieux

Pourquoi cette faim d’autre chose
Qui me coupe le corps en deux et le démembre
D’où vient cette soif qui me dénude
Comme le plus simple animal

Penser à toi pourrait suffire

Jean-Jacques Maredi